mercredi 29 juillet 2009

Suivre un régime serait indécent aux yeux des Africains?

Alerté par le taulier de Reversus, je suis amené à lire le billet d'Etiam Rides qui me renvoit vers celui de Merachlor.

Son sujet - une femme et son enfant morts de faim en France pour déboucher sur la faim dans le monde - intéressant au demeurant, prend une tournure qui ne me plaît guère.

Je n'aime pas ce côté trop émotionnel (s'indigner) sans dénoncer l'essentiel.

Entendons-nous bien, il ne s'agit pas ici de blâmer quelqu'un pour une indignation bien humaine - je l'approuve bien au contraire - mais pour laisser ses émotions gouverner son esprit lorsque l'indignation aurait pu être dirigée vers les véritables sources du mal de notre société globalisée.

A juste titre, est-il souligné que la mondialisation n'a eu de mondialisation que le nom dans la mesure où ceux qui détenaient déjà les capitaux ont multiplié leurs sources de richesse quand les pays du sud sont maintenus dans une pauvreté constante. Pis encore, certains pays - notamment d'Afrique - se sont proportionnellement appauvris.

Ce paradoxe est bien loin des fondements du capitalisme qui en favorisant les moyens de production recherche la multiplication des richesses au profit de tous.
Ainsi, lorsque des capitaux investissent, l'offre doit se diversifier, le nombre d'emplois augmenter les fournisseurs s'enrichir créant de nouveaux emplois, etc.

Sauf que...viennent s'y mêler les notions de commerce équitable (fair trade) et de puissance de négociation (bargaining power).
En effet, beaucoup des effets pervers de notre société "globalisée" est due à l'influence de la financiarisation de l'économie. Des actionnaires, dans la lignée des fonds de pension américains, avides de profits à court terme imposent de maximiser les bénéfices au mépris d'une logique à moyen et court terme. Dès lors, peu importe de saigner les fournisseurs, d'abuser de sa position dominante dans une négociation, du moment que le prix de revient est au plancher et la valeur ajoutée au plafond.

En outre, au lieu de réinjecter les richesses dans les moyens de production, c'est en direction des dividendes que celles-ci sont trop souvent amenées.
L'entreprise qui investit ne multiplie donc pas ses moyens de production, et ne permet pas aux fournisseurs, ni même aux salariés de développer leurs ressources.

Le capitalisme part d'un postulat: il ne fonctionne parfaitement que dans un contexte d'équité et de concurrence parfaite.
Ainsi n'en va-t-il pas des occidentaux qui usent et abusent de la main-d'oeuvre à bas prix des pays moins développés. Il faut freiner ces effets et rendre la concurrence équitable.

On ne peut décemment continuer à maintenir un système où un pays comme les Etats-Unis, représentant moins de 5% de la population mondiale consomme plus de 50% des matières premières produites sur le globe.

La production est globalisée, mais la consommation ne l'est pas. Cela ne fait que confirmer ce que beaucoup savent: l'Occident s'enrichit aux dépens des pays dits du Sud.

Alors on peut certes s'indigner contre le peuple enfermé dans un cycle "suralimentation - régime", ce n'est pas en les culpabilisant qu'on changera quoique ce soit.
Tout juste arriverions-nous à les inciter à donner un petit billet aux oeuvres charitatives, pour la bonne conscience. C'est d'ailleurs ce que font la plupart des Anglais et des Américains. Mais ceux qui crèvent la dalle n'en ont que faire de notre bonne conscience. Ils crèvent la dalle c'est tout.

C'est sympa d'avoir un sac de riz de temps en temps. Mais ce serait nettement plus sympa d'avoir les moyens de s'acheter et de se procurer un sac de riz tous les jours.

Je ne vois qu'une bonne réponse à cela: rendre le commerce "équitable" en imposant des taxes sur les importations de produits et de services provenant d'entreprises jouant au dumping social et fiscal tout en menant un programme concerté de développement des pays du Sud. Mesures proposées par le Mouvement Démocrate.

Pendant ce temps-là, on continue à organiser des concours de hot-dogs aux Etats-Unis (et ailleurs), se moquant de l'indécence de ce spectacle projeté au reste du monde, ou ne serait-ce qu'aux 36 millions d'américains vivant sous le seuil de pauvreté.

Je reste convaincu qu'il faut réinventer le capitalisme et ne pas l'abolir. Il faut aménager ses effets pour une juste redistribution et non pas collectiviser à outrance.

Pour sortir les pays du Sud de leur pauvreté, il faut casser la machine à financiariser et imposer une forme de commerce équitable.

Le temps de l'indignation est dépassé.

Mise à jour 00h25: Suite aux réactions fondées de Merachlor et Etiam Rides, je révise mon billet.

3 commentaires:

  1. Euh... T'es sûr que t'as lu le billet jusqu'à la fin? Parce que la faim dans le monde, c'est 2 paragraphes dans un texte qui parle surtout de deux personnes qui sont mortes d'inanition en France. A ce titre, l'évocation du florissant fat & diet business me semble assez cohérent avec le reste du billet.

    C'est un billet fait avec les tripes, et alors? C'est une saine colère. Une colère morale et non moralisatrice.

    Et puis, qualifier l'auteur de "gauchiste bobo qui sait si bien s'indigner sans jamais ne rien changer" en tête de billet, est-ce qu'en matière de ton moralisateur, ça ne relève pas un peu de la paille et de la poutre?

    Sinon, j'aurais beaucoup de choses à dire sur le coeur du billet, beaucoup plus intéressant, mais ce commentaire commence à traîner en longueur.

    Je me contenterai donc de jouer au jeu du collage.

    N'y a-t-il pas une contradiction entre ces deux postulats:

    Le capitalisme part d'un postulat: il ne fonctionne parfaitement que dans un contexte d'équité et de concurrence parfaite.


    Je reste convaincu qu'il faut réinventer le capitalisme et ne pas l'abolir.

    ?



    Pour créer une concurrence parfaite (atomicité, libre entrée, information parfaite et homogénéité des facteurs, entre autres), et si tant est que ce soit possible, pas d'autre solution que d'accroître toutes les formes de libéralisation et de dérégulation. Sinon, il ne fonctionne pas parfaitement.

    Pourtant, les mesures que tu proposes vont dans le sens inverse (notamment le protectionnisme, même si tu évites soigneusement d'écrire le mot).

    Donc de deux choses l'une: soit tu prônes un capitalisme qui ne marche pas, soit tu t'accroches à un mot plus pour sa charge affective que pour le concept qu'il porte.

    Je penche évidemment pour la 2ème option, et ta remarque sur la "collectivisation à outrance", posée comme seule alternative au capitalisme, me suggère que j'ai raison.

    Mais rappelle-toi qu'entre les eaux glacées du calcul égoïste et les soviets, il reste un grand éventail d'options...

    RépondreSupprimer
  2. C'est bien le danger de lire en diagonale pour gagner du temps pour , au final, si peu en comprendre. A moins de faire preuve d'une réelle mauvaise foi dont je ne me permettrai pas de te suspecter. Le sujet du billet n'était nullement "la faim dans le monde" (ce en quoi, il aurait été ridiculement argumenté et si peu documenté).

    Je faisais simplement un parallèle entre notre sur-consommation, nous pays riches, et les nations pauvre pour amener un fait : une femme et sa fille étaient mortes de faim. Pas en Afrique, en France. C'était là tout mon propos. Et ma révolte.

    Mon indignation, dont tu fais semble faire grand cas, porte sur ce que ce fait montre.
    Que des morts par dénutrition ne soulèvent plus personne.
    Que le système broie dans l'indifférence (et l'égoïsme) générale.
    Je ne suis pas un moralisateur ... et ne les supporte pas plus.

    Quant à "l'attitude typique du gauchiste bobo qui sait si bien s'indigner sans jamais ne rien changer", je l'estime particulièrement désobligeante. Surtout de la part de quelqu'un qui base son jugement sur un unique billet lu, et dont la teneur lui a de surcroît échappé.
    Que sais-tu de moi pour te permettre ton crachat ? De mes activités au quotidien ? Mes billets donnent-ils de moi une image de quelqu'un passif, confortablement installé dans son salon, se contentant de donner la pièce aux associations pour soulager sa conscience ? De rager, d'enrager sans agir ? Ah, tu n'en n'as lu aucun autre ... Dommage. Avant de me permettre un jugement, je m'efforce de m'intéresser (voire de me documenter) un minimum sur la personne. Disons que ta capacité de discernement t'aura particulièrement fait défaut cette fois-ci.

    Mon blog me sert à passer mes indignations qui te gênent tant et mes coups de gueule. Il n'est en rien "un exercice d'équilibriste entre promotion de l'ego et humilité réaliste". Et de nombrilisme.

    Etiam Rides a pointé tes contradictions, je n'irai pas plus loin.

    Au final, ce qui m'agace profondément dans ton "billet d'interpellation" , c'est cette "sentence de fin" :
    "Le temps de l'indignation est dépassé."

    Ce n'est pas ma conception des choses. Ce pays crève du manque d'indignation.

    Cordialement,

    RépondreSupprimer
  3. Merachlor, (et Etiam indirectement)

    Je suis de ceux qui savent reconnaître leurs erreurs.

    Je vous présente mes excuses pour la méprise sur le message de mon billet.

    J'ai rectifié le côté agressif et personnel (qui n'était pas l'intention) pour me concentrer sur l'essentiel du message.

    J'essaye de vous répondre dès que je peux sur le reste. Là, je vais dormir car j'ai eu une journée pleine d'émotions. ;)

    RépondreSupprimer

Merci de vous identifier ou au moins de signer votre commentaire d'un pseudonyme.

 
blog d'expatrié